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Antoine Béclère 

    Les évaluations du ministère...sic   

 

 

Le ministère a évalué le résultat des embauches hors frontières pour pallier la pénurie française
Le recrutement d'infirmières espagnoles à l'heure du bilan
Pour la seule région Ile-de-France, il manquerait 6 000 infirmières. L'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris cherche à recruter 1 200 personnels.

 

Hervé Guénot - Le Figaro
 

[04 janvier 2005]

 

Les personnels soignants espagnols recrutés en 2002 se sont-ils durablement intégrés dans le tissu hospitalier français ? Le ministère de la Santé tire, pour sa part, un bilan positif de ces recrutements. Une évaluation nationale faite à partir de 76 établissements montre que le bilan est positif pour 55 établissements, négatif pour 14. Sur 524 infirmières, le taux de départ est de 8%, un «taux exceptionnellement bas», souligne-t-on au ministère.


Mais ces chiffres ne rendent pas entièrement compte des tiraillements observés sur le terrain. Car si les infirmières espagnoles présentent «compétence et niveaux techniques élevés, satisfaction générale, intérêt des patients pour ces personnels, qualité des contacts humains», il a été enregistré «des départs prématurés, un retour sur investissement faible, des problèmes liés au niveau de compétences et des difficultés d'intégration, voire d'acceptation au sein des équipes.»


Le ministère de la Santé insiste sur l'importance de l'accueil dans les établissements de ces infirmières espagnoles. Elles sont parfois très jeunes, parlent mal le français, rencontrent des problèmes de logements et arrivent dans un système de santé en crise. Et il est vrai que les établissements qui ont le mieux organisé l'intégration des personnels espagnols enregistrent le moins de départs.


À l'hôpital Albert-Chenevier de Créteil (Val-de-Marne), les 10 infirmières espagnoles (3 garçons et 7 filles) ont été bien accueillies. Elles ont été affectées en neurologie. Quatre sont ensuite parties à l'hôpital Henri-Mondor, 4 sont reparties en Espagne, 2 ont formé un couple. «Cela a exigé beaucoup d'efforts pour faciliter leur venue», explique Patricia Caffin, représentante de la CGT à Albert-Chenevier. Dans d'autres hôpitaux, l'accueil fut glacial. Une infirmière val-de-marnaise qui exige l'anonymat reconnaît que «surchargées de travail, nous n'avions que peu de temps à leur consacrer. Nos collègues espagnoles ont été mal encadrées, livrées à elles-mêmes.»


Même en cas d'un accueil bien réalisé, le principal obstacle a été la connaissance du français. La formation linguistique est, de l'avis général, insuffisante. Certains ne se privent pas de demander si un patient qui souffre doit parler espagnol pour se faire comprendre.


«Sortant de l'école, nos collègues ont une bonne connaissance des gestes techniques. Pour les médicaments, on les a encadrées étroitement», ajoute Patricia Caffin. Sa collègue anonyme ajoute : «On ne peut débarquer dans un pays, mal connaître la langue, et suivre des prescriptions. Il n'y a pas eu de catastrophe, mais cela peut être une importante source d'erreurs et de danger pour tous.»


De plus, ces jeunes infirmières se trouvent projetées dans un système hospitalier en crise qui exige d'elle, vite, une efficacité maximale dans un contexte de pénurie d'un personnel épuisé. «Certaines font la nuit avec tous ses aléas. Solitude face aux malades. Pas de médecin. Des malades à qui il est difficile de parler, raconte une infirmière. On arrive le soir sans savoir dans quel service on va travailler. Une de mes collègues espagnoles, lassée d'être promenée dans les services, a démissionné.» Ainsi, nombre de personnels hospitaliers, tout en appréciant le renfort apporté par ces infirmiers et infirmières espagnols, estiment que cette importation de main-d'oeuvre est plus un expédient qu'un véritable moyen de résoudre la crise du personnel hospitalier.